L’indémodable Harrington

Le Harrington est un blouson léger, imperméable et à la coupe courte, généralement doublé en tartan. On le reconnaît notamment à ses deux poches latérales inclinées à rabat ainsi que son col montant à deux boutons, qui lui confient son fort caractère.

Comment ce mythique blouson, reconnaissable entre mille, a brisé les codes et franchi les barrières sociales ? Retour sur une histoire pas comme les autres.

D’où vient le blouson Harrington ?

Querelles entre Anglais

À la sortie d’un pub du Lancashire, deux Anglais se disputent à propos d’un sujet épineux : la création du Harrington. En effet, les marques Baracuta et Grenfell prétendent chacune avoir inventé cet indémodable blouson pour la pratique du golf dans les années 1930. Baracuta s’enorgueillit même de toujours proposer à sa clientèle son modèle historique de Harrington, le G9. Pas sûr qu’une simple bière suffira toutefois à réconcilier les deux…

On ne mettra jamais fin à cet éternel débat mais une chose est sûre, le Harrington vient bien du Nord-Ouest de l’Angleterre et de nulle part ailleurs. Une marque française nommée Harrington existe bel et bien mais cette dernière n’a été fondée qu’en 1985 et n’est pas à l’origine-même du blouson.

Conçu pour le golf, le blouson Harrington s’adresse donc dans ses premières années aux classes huppées britanniques. La marque Baracuta a l’idée d’ajouter une doublure en tartan à son modèle G9 (G comme Golf, au passage) en 1938, renforçant l’aspect noble du blouson.

Immigration vers les États-Unis

Après la Seconde Guerre Mondiale, le Harrington traverse l’Atlantique avec le retour des soldats américains. La marque américaine McGregor sent alors qu’il y a un coup à jouer et propose dès 1947 son propre Harrington, le Drizzler, en s’inspirant largement du modèle original G9 de Baracuta qui commence à s’exporter Outre-Atlantique à partir de 1950.

Le Harrington se popularise très vite aux États-Unis, s’inscrivant dans le style Ivy League, très en vogue dans les années 50 chez les jeunes issus des classes bourgeoises qui fréquentent les universités les plus prestigieuses du pays.

Comme souvent, le cinéma joue un rôle clef dans la démocratisation du blouson au pays de l’Oncle Sam. Que ce soit avec James Dean qui porte un Harrington rouge dans Rebel Without a Cause (1955) ou Elvis Presley qui porte un modèle G9 beige de Baracuta dans King Creole (1958), le blouson est mis à l’honneur par des acteurs et des chanteurs charismatiques. De plus, la mort tragique de James Dean dans un accident automobile en 1955, juste avant la sortie de ce qui sera son dernier film, fait rentrer un peu plus dans la légende le Harrington…

Steve McQueen prend la relève dans les années 60, notamment dans le film The Thomas Crown Affair (1968) où il porte une veste de golf bleu marine, pilotant un planeur. De plus, la folie du Harrington s’empare aussi du petit écran pendant les Sixties. En effet, le feuilleton américain Peyton Place est le premier à être diffusé en prime time sur la chaîne ABC, et son personnage principal, un certain Rodney Harrington, a l’habitude de porter un G9. Très populaire, ce héros de série participe ainsi à l’ascension du blouson… lui donnant par la même occasion son nom.

Un blouson pas seulement chic

Retour aux sources et nouveau départ

Indissociable de la culture anglaise, le blouson Harrington a traversé les époques et marqué son pays d’origine en touchant divers mouvements jeunes qui y sont nés. À commencer par les mods (abrévation de l’anglais « Modernists »), des jeunes actifs urbains attachés au modern jazz, à la fête et portant une attention toute particulière à leur style vestimentaire. Le Harrington est une pièce essentielle de cette sous-culture née à Londres à la fin des années 50, qui s’oppose directement aux bikers et rockers.

Peu connue en France où elle ne s’est jamais développée, la mouvance mod a en revanche eu un énorme impact sur la culture britannique, en termes d’ouverture d’esprit, de musique et de style. Par exemple, les mods ont popularisé les marques Fred Perry ou Ben Sherman, elles aussi connues pour leur Harrington. À noter que ces marques sont parfois associés aux plus sulfureux skinheads, qui sont en fait à l’origine des hard mods, issus des quartiers ouvriers et populaires.

Élégant, rebelle mais surtout universel

À travers les mods et les skinheads, le Harrington touche une cible bien plus large et marque le style anglais. Le blouson s’encanaille un peu plus auprès du mouvement punk, qui émerge au milieu des années 70. Symbole de cette génération et leader du groupe The Clash, Joe Strummer aime particulièrement arborer la veste de golf durant ses concerts. Les punks se réapproprient ainsi autant le tartan (ndlr : retrouvez notre article sur le sujet) que le Harrington, généralement doublé du célèbre motif à carreaux, et renforcent leur côté rebelle.

Sans aucun doute, la plus grande force du Harrington est d’avoir conquis le cœur des jeunes de différentes époques et catégories sociales, qui se le sont à chaque fois réappropriés à leur façon. De Liam Gallagher à Daniel Craig dans le rôle de James Bond, le Harrington est devenu le blouson anglais par excellence, sans jamais se démoder.

Le Harrington Rodney de Paname Collections

Comme pour le tartan, on aime autant le côté chic du Harrington que son côté rebelle chez Paname Collections. Vu qu’on ne change pas une équipe qui gagne, on est encore allé chercher une toile super 110’s de chez Vitale Barberis Canonico, prestigieux filateur italien avec qui on avait déjà travaillé pour notre Teddy Ted.

Pour rappel à notre premier blouson, on a choisi la même doublure rayé rouge. Le coloris bleu de minuit met quant à lui en valeur cette pièce de caractère, qui ne vous laissera jamais tomber. Maintenant, une seule question se pose à vous : col remonté ou col plaqué ? À vous de voir !

Quentin G.