Alors que les vêtements rayés étaient à l’origine destinés aux marginaux au bas de l’échelle sociale comme les domestiques ou les bagnards, la marinière est contre toute attente devenue avec le temps un vêtement chic, symbole du savoir-faire français.
Quelle est donc l’histoire de cet emblème national, cliché français par excellence au même titre que le béret et la baguette ?
Installez-vous confortablement car comme d’habitude, on vous raconte tout.
La marinière, uniforme de la Marine
Un vulgaire slip de matelot ?
Pour comprendre le destin si particulier de la marinière, il faut revenir comme bien souvent à ses origines.
Bien que la date de naissance exacte de la marinière reste floue, les historiens s’accordent sur un point : les premières représentations de la marinière remontent au XVIIIème siècle. Des tableaux anglais ou hollandais de l’époque mettaient alors en scène des marins portant des hauts rayés bleus et blancs, ou parfois rouges et blancs, lors de batailles navales.
En France, c’est l’année 1858 qui marque un réel tournant dans l’histoire de la marinière. En effet, la Marine nationale introduit alors le « tricot rayé bleu indigo et blanc » dans la liste officielle des tenues de matelot. Le décret ne s’arrête pas seulement là car il réglemente aussi le nombre de rayures de la marinière ainsi que leur mesure, de manière très précise : « 21 raies blanches larges de 20mm et 20 ou 21 raies bleues larges de 10mm » pour le corps, puis « 15 raies blanches larges de 20mm et 14 ou 15 raies bleues larges de 10mm » pour les manches.
Fabriqué dans un jersey de coton, ce tricot arrivait jusqu’aux genoux et était utilisé comme sous-vêtement par les marins. Ces derniers rentraient donc leur marinière dans leur pantalon à pont et portaient généralement par-dessus une vareuse, ou blouse de marin, qui cachait les manches trois-quarts de la marinière. Pour la petite anecdote, les vêtements de matelots étaient tous conçus sans boutons ou grosses coutures afin d’éviter de se prendre dans les cordages et les mailles des filets sur le bateau.
Les mythes qui entourent la marinière
Comment et pourquoi ces couleurs et ces rayures ont-elles été choisies ? L’hypothèse la plus probable est sans doute que les rayures rappelaient aux matelots qu’ils étaient en bas de la hiérarchie de la Marine… Cependant, les légendes les plus variées fleurissent autour de cette question.
Le mythe le plus répandu voudrait que les rayures permettaient aux marins de plus facilement repérer un de leurs collègues tombés à l’eau. Sachant que la marinière était un sous-vêtement que les marins portaient la plupart du temps sous leur vareuse, on vous laisse vous faire votre propre opinion…
Pour les couleurs, il est clair que le bleu et le blanc sont depuis toujours associés à la mer et au monde marin. De plus, l’indigo avait la réputation de faire fuir les rats, qui infestaient régulièrement les ports et les navires. La teinture indigo était toutefois très onéreuse à l’époque. Ainsi, la deuxième explication possible serait que, pour faire des économies, les fabricants auraient eu l’idée d’appliquer des rayures aux vêtements de marins.
Quant aux 21 rayures, la légende raconte qu’elles correspondent aux 21 victoires de Napoléon…
Le virage à bâbord de la marinière
Quand la haute couture s’empare de la marinière
La marinière, c’est une grande histoire d’amour avec les marins mais aussi avec les femmes, sous l’impulsion des plus grands créateurs de mode français.
Premièrement, rendons à César ce qui est à César. Même si elle n’a jamais réellement proposé de marinière à proprement parler dans ses collections, Coco Chanel s’inspire bien des vêtements militaires de la Marine (qu’elle côtoie à Deauville) et participe ainsi à la libération de la femme pendant l’entre-deux-guerres. En effet, elle utilise des coupes ou des matières similaires aux tenues de marins, comme le jersey de coton par exemple, pour proposer des créations destinées à un tout autre public, les femmes bourgeoises.
En privé, Coco Chanel n’hésite d’ailleurs pas à porter des marinières, comme le montre le célèbre cliché ci-dessous. Elle est la première femme à faire de la marinière un vêtement unisexe.
Mise ensuite à l’honneur par de nombreuses personnalités comme John Wayne, Pablo Picasso ou encore Brigitte Bardot, la marinière s’impose petit à petit comme un élément incontournable du vestiaire masculin et féminin entre les années 1940 et 1960.
Dans la haute couture, Yves Saint Laurent perpétue l’héritage de Coco Chanel et détourne la marinière en 1966 dans sa collection « Matelot ». Mais celui qui fera de la marinière sa véritable marque de fabrique, c’est bien entendu Jean-Paul Gaultier. Le fameux tricot rayé se retrouve au cœur de nombreuses de ses collections, notamment la collection « Toy Boy » en 1983, où il saluera le public lui-même habillé en marinière à la fin de son défilé de présentation. Le créateur a aussi l’idée d’utiliser la marinière pour habiller les flacons de sa ligne de parfums pour hommes, « Le Mâle », véritable succès commercial toujours d’actualité.
La marinière comme emblème national
S’adressant aussi bien aux hommes qu’aux femmes, la marinière a su conquérir le cœur de tous les Français (et pas seulement des Bretons !), et s’est érigée par la même occasion en symbole du chic à la française ou encore du « Made in France » (ndlr : retrouvez ici notre article sur la fabrication française). Vous n’avez qu’à demander à l’ancien ministre du redressement productif Arnaud Montebourg !
Preuve que la marinière est bien un emblème national, l’équipe de France de football adopte une marinière comme second maillot en 2011 suite à une proposition du couturier et styliste allemand Karl Lagerfeld. Malgré quelques critiques, l’équipement américain Nike réédite l’expérience en habillant les Bleus d’un maillot rayé à plusieurs reprises entre 2012 et aujourd’hui, dont une autre marinière, qui fut le maillot d’entraînement lors la victoire au Mondial russe en 2018.
Notre revisite de ce symbole français
Pour notre première capsule « Made in France », la marinière était un choix évident. Nous avons pris la décision de la retravailler la marinière classique avec Jeanne. On a joué sur la largeur des lignes et les écarts entres celles-ci pour casser un peu les codes. Bien sûr on a gardé le nombre de rayures habituelles avec 21 rayures indigo et 22 rayures écrues !
La capsule est maintenant disponible en préventes sur le site, n’hésitez plus, foncez !
Quentin G.